34% des dentistes refusent de traiter les séropositifs !
Ce sont les chiffres que vient de révéler Aides, une association de lutte contre le sida. 33,6% des dentistes refusent de soigner les personnes séropositives selon une opération de testing. Sur 440 chirurgiens dentistes contactés pour un simple détartrage, 33,6 % de spécialistes (ou leur secrétaire) ont refusé de recevoir le patient annonçant sa séropositivité.
Les refus de soins pour les séropositifs sont une réalité pour Christian Andreo
“C’est inadmissible”, a déclaré à l’AFP Christian Couzinou, président de l’Ordre national des chirurgiens-dentistes qui avoue “tomber des nues”. Les refus sont directs dans 3,6% des cas et déguisés pour 30%. Les praticiens proposent des horaires contraignants, évoquent des dépassements d’honoraires, réorientent vers un service hospitalier ou un confrère.
L’association annonce dans un communiqué avoir pris cette initiative “face aux cas récurrents de refus de rendez-vous ou de discriminations rapportés par les personnes vivant avec le VIH dans leur accès à des soins dentaires”.
“Dans le cadre de la loi de santé, on a vu arriver des mesures sur les refus de soins qui sont quand même très très légères … même en dessous de ce que l’on pouvait avoir dans la première mouture”, explique à l’AFP Christian Andreo, directeur des actions nationales d’Aides. “On a voulu montrer que les refus de soins sont une réalité, qu’il faut une législation renforcée”.
Invité du Grand Soir 3, Paul Samakh, vice-président de l’ordre national des chirurgiens dentistes a tenu à s’excuser : “A titre personnel et au nom du conseil de l’ordre des chirurgiens dentistes, je suis atterré par ce qu’il s’est produit depuis quelques heures, car notre code de déontologie, aussi bien que la morale nous obligent à soigner tout le monde”.
Un testing sur plus de 400 chirurgiens-dentistes
Sur son site internet, l’association diffuse des enregistrements des conversations téléphoniques. “Les personnes dans votre cas, on préfère les mettre en fin de matinée, ça me permet de bien nettoyer le cabinet après”, “ça serait mieux pour vous de vous adresser à l’hôpital” ou “je ne fais pas beaucoup de détartrage” sont quelques unes des réponses obtenues.
“Un comportement comme ça, je croyais que cela n’existait plus !” a réagi le Dr Couzinou, en “incitant” les patients qui ont appelé à porter plainte auprès du conseil départemental de l’ordre. “Vous avez des gens qui ont le sida, ou des hépatites, et qui ne le savent même pas, donc on les soigne comme tout le monde” poursuit-il.
“Un cabinet dentaire est un haut lieu de sécurité, tout est stérilisé ou à usage unique – on change de gants et de masque entre chaque patient -, pour prévenir les infections nosocomiales” (ndlr ,contractées lors des soins)” ajoute le Dr Couzinou.
Pour réaliser le testing, les militants ont contacté 440 chirurgiens-dentistes dans 20 villes différentes entre le 7 et le 14 avril 2015. Affichant les même caractéristiques sociodémographiques, une personne annonce sa séropositivité au téléphone, l’autre ne dit rien.
L’Ordre National des chirurgiens-dentistes lance un rappel à ordre
L’Ordre National des Chirurgiens-Dentiste (ONCD) a réagi aujourd’hui, avec la publication d’un communiqué rappelant les valeurs de leur profession. Il est également rappelé dans ce communiqué que les chirurgiens-dentistes ne se pliant pas aux règles de déontologie s’exposent à « des poursuites, tant devant les juridictions disciplinaires, que pénales ».
Le communiqué de l’ONCD explique que tout individu, peu importe sa maladie, doit « bénéficier d’une même chaîne de décontamination et de stérilisation », d’autant plus que certains porteurs du VIH peuvent ne pas être au courant de leur infection…
Le « testing » contre les discriminations
Le testing, test de situation ou test de discrimination, est un moyen d’investigation et une forme d’expérimentation sociale en situation réelle destiné à déceler une situation de discrimination. Dans le cas le plus simple, on compare le comportement d’un tiers envers deux personnes ayant exactement le même profil pour toutes les caractéristiques pertinentes, à l’exception de celle que l’on soupçonne de donner lieu à discrimination.
Le testing désigne une pratique surtout6 utilisée par les associations anti-racistes telle que SOS Racisme pour mettre en évidence une discrimination raciale. Elle est “reconnue” par les tribunaux français dans la mesure où considérée comme pratique déloyale, elle ne peut être écartée comme moyen de recherche de la preuve. Il s’agit d’apporter la preuve de l’intention discriminatoire : il faut pour cela établir que le seul motif possible à un refus soit la discrimination.