En lançant l’hypothèse d’une possibilité de transmission pour la maladie d’Alzheimer, le spécialiste londonien des maladies neurodégénératives John Collinge a suscité la crainte du grand public et les interrogations des scientifiques.
L’hypothèse d’une transmission d’Alzheimer entre humains relancée
Des dépôts de protéines amyloïdes dans le cerveau, une des deux signatures de la maladie d’Alzheimer, ont été curieusement retrouvées à l’autopsie sur des personnes relativement jeunes, mortes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) après avoir été contaminées par un ancien traitement à base d’hormone de croissance.
Dans une recherche publiée mercredi dans Nature, le Pr Collinge fait l’hypothèse d’une double infection de ces personnes par des extraits de glande hypophyse pris sur des cadavres. Ces injections auraient été porteuses à la fois de prions, agent pathogène de la MCJ, et de protéines amyloïdes qui auraient conduit aux dépôts dans le cerveau, annonciateurs de la maladie d’Alzheimer.
QUESTION – A la lumière de cette recherche, doit-on considérer la maladie d’Alzheimer comme une maladie potentiellement transmissible?
REPONSE – Selon le spécialiste Luc Buée (Inserm/Université de Lille), ce travail n’apporte pas la preuve de la transmissibilité d’Alzheimer mais en émet seulement l’hypothèse.
“Collinge fait une hypothèse : les extraits d’hypophyse provenaient de cadavres malades d’Alzheimer et contenaient non seulement le prion, mais aussi la protéine amyloïde pathologique. C’est une hypothèse, il n’a aucune preuve”, explique-t-il à l’AFP.
En outre, si cette hypothèse s’avère exacte, rien ne prouve que ces personnes auraient développé véritablement la maladie d’Alzheimer, selon ce chercheur. Ils sont morts prématurément de MCJ et n’ont montré à l’autopsie qu’un des deux signes d’Alzheimer (l’autre signature, l’accumulation de protéine Tau, n’a pas été retrouvée).
“Cet article ne démontre pas que ces personnes auraient développé Alzheimer, si elles avaient vécu suffisamment longtemps”, souligne aussi le chercheur britannique Pr David Allsop (Université de Lancaster).
Q – Si l’hypothèse de Collinge et le caractère transmissible d’Alzheimer se confirment, quels sont les risques encourus?
R – Cet article ne fait absolument pas d’Alzheimer une maladie “infectieuse, capable de s’attaquer à tous, jeunes comme vieux”, insiste le Pr Roger Morris (King’s College de Londres).
“Est-ce que quand je rend visite, à la maison de retraite, à ma grand-mère qui souffre de la maladie d’Alzheimer, je vais être contaminé? Je l’embrasse mais je ne lui lèche pas le cerveau, je ne lui fait pas de prise de sang. Il n’y a là pas de risque de contamination”, déclare Luc Buée.
“Les gens en première ligne, qui ont disséqué des cerveaux de personnes mortes d’Alzheimer, n’ont pas développé cette maladie. Donc la transmissibilité qui, théoriquement, selon l’hypothèse de Collinge peut exister, doit être très, très, très, très faible. Il ne faut pas tomber dans une phobie comparable à celle connue pour le virus Ebola”, ajoute-t-il.
Q- Faut-il renforcer les procédures de désinfection pour les interventions chirurgicales, les précautions à prendre pour les actes médicaux à risque?
R – “Il n’y a aucune preuve que la maladie d’Alzheimer puisse être transmise d’une personne à une autre ou bien à travers l’utilisation d’instruments chirurgicaux contaminés”, note le Pr Allsop (Université de Lancaster).
En outre, les procédures pour désinfecter les instruments hospitaliers face au risque de protéines de type prion ou amyloïde sont “bien connues”, ajoute Luc Buée.
“On a mis en place des procédures dans les laboratoires (qui travaillent sur ces protéines, ndlr), mais rien d’exceptionnel avec double paire de gants, masque comme un chirurgien. On sait que le formol n’élimine pas ces protéines, donc on utilise d’autres détergents, d’autre méthodes pour aseptiser les instruments”, précise ce chercheur.
Maladie d’Alzheimer
La maladie d’Alzheimer (en allemand alʦhaɪ̯mɐ) est une maladie neurodégénérative (perte progressive de neurones) incurable du tissucérébral qui entraîne la perte progressive et irréversible des fonctions mentales et notamment de la mémoire. C’est la forme la plus fréquente dedémence chez l’être humain. Elle fut initialement décrite par le médecin allemand Alois Alzheimer en 1906.
Le premier symptôme est souvent des pertes de souvenirs (amnésie), se manifestant initialement par des distractions mineures, qui s’accentuent avec la progression de la maladie. Les souvenirs plus anciens sont cependant relativement préservés. L’atteinte neurologique s’étend par la suite aux cortex associatifs frontaux et temporo-pariétaux, se traduisant par des troubles cognitifs plus sévères (confusions,irritabilité, agressivité, troubles de l’humeur et des émotions, des fonctions exécutives et du langage) et la perte de la mémoire à long terme. La destruction des neurones se poursuit jusqu’à la perte des fonctions autonomes et la mort.
La maladie d’Alzheimer touchait environ 26 millions de personnes dans le monde en 2005 et pourrait en toucher quatre fois plus en 2050, ce qui équivaudrait alors à une personne sur 85. Dans les pays développés, la maladie d’Alzheimer est l’une des pathologies les plus coûteuses pour la société.
Étant donné la prévalence de la maladie, un important effort est mené par la recherche médicale pour découvrir un médicament qui permettrait de stopper le processus neurodégénératif. La principale piste de recherche vise à s’attaquer aux plaques amyloïdes qui se forment entre les neurones au cours de la maladie et aux agrégats de protéines tau formant les dégénérescences neurofibrillaires à l’intérieur des neurones. (Source Wikipedia)