Hollande tente de rassurer les médecins appelés à une nouvelle grève
François Hollande est monté au créneau lundi pour tenter de désamorcer les crispations avec les médecins, appelés par leurs syndicats à une nouvelle grève et à boycotter en partie la carte Vitale, leur promettant un tiers payant généralisé « plus simple ».
Alors que la ministre de la Santé Marisol Touraine tente en vain d’apaiser les inquiétudes, le chef de l’Etat a pour la première fois depuis le début du conflit pris la parole.
« Je comprends les médecins qui disent qu’il ne faut pas que ce soit compliqué », ils ont « parfaitement raison », a-t-il déclaré sur France Inter. « Il ne faut pas qu’on soit remboursé à la Saint-Glinglin ». Et de promettre: « Il faut qu’on puisse être capables d’être beaucoup plus simples, beaucoup plus efficaces », tout en défendant le dispositif, une de ses promesses de campagne.
« M. Hollande n’a rien compris à la portée de notre mouvement », a réagi auprès de l’AFP Eric Henry, président du syndicat des médecins libéraux. La grève du 23 au 31 décembre, qui se poursuivait lundi notamment dans les cliniques, « n’est pas liée au problème technique que pose le tiers payant généralisé intégral » mais à « cette mesure même qui est un acte politique et qui va contraindre patients et médecins à rentrer dans le nouveau système de soins que le gouvernement veut nous imposer ».
« Quand le président commence à sortir du bois et à se sentir obligé de servir de bouclier, c’est que la ministre de la Santé chancelle », poursuit le dirigeant syndical qui exige une réécriture du texte de loi avant son examen au Parlement au printemps.
La dispense d’avance de frais lors d’une consultation, prévue pour tous les assurés d’ici à 2017, est l’une des mesures emblématiques du projet de loi Santé porté par Mme Touraine, texte très vaste axé sur la prévention et l’accès aux soins.
C’est aussi celle qui cristallise la colère des médecins qui n’apprécient guère la perspective d’être directement payés par l’assurance maladie et par les mutuelles, et restent dubitatifs sur la faisabilité technique du dispositif et sur son coût.
Grève dans les cliniques
Le projet de loi constitue aussi une « perte d’indépendance » et une « étatisation du système de santé », estiment les 400 médecins, principalement des chirurgiens du secteur privé, qui ont manifesté lundi à Lyon.
Après 10 jours de grève des consultations dans les cabinets, le mouvement a gagné lundi les cliniques, à l’appel notamment du Bloc (syndicat de chirurgiens), et du Syndicat National des Urgentistes de l’Hospitalisation Privée.
« Toutes les urgences vitales sont assurées » dans les quelque 130 établissements privés disposant de services d’urgences, précise cependant Philippe Cuq, président du Bloc, et les opérations ou consultations programmées ont été décalées.
« La ministre a donné ordre de réquisitionner, par milliers, ces médecins que la loi santé veut justement supprimer demain en excluant les cliniques du service public hospitalier » redéfini dans la future loi, dès lors qu’un seul de leurs médecins pratiquera des honoraires libres, selon lui.
Dans un courrier adressé au président de la fédération de l’hospitalisation privée (patron de cliniques), la ministre évoque toutefois des « dérogations limitées » à cette participation au nouveau service public hospitalier, qui feront l’objet d’une concertation « dès la rentrée de janvier ».
Mais « aucun rendez-vous n’a été pris, il y a zéro concertation », assure le Dr Cuq.
Dans les cabinets, les syndicats font par ailleurs mine de durcir le mouvement en appelant à une « guérilla » administrative, alors même que certains représentants doivent être reçus cette semaine par Mme Touraine.
Mais les modalités choisies font polémique, notamment le boycott partiel de la carte Vitale –qui permet la transmission électronique des feuilles de soins. Cette mesure pourrait ne pas être suivie par les médecins car elle pénalise le patient en retardant de « plusieurs semaines », selon la Sécu, les délais de remboursement.
Il est une nouvelle fois difficile de quantifier la participation à la grève et ses retombées sur les patients. Le conflit de Noël a donné lieu à une guerre des chiffres entre les syndicats et les autorités, l’assurance maladie soulignant notamment que les consultations n’ont pas fléchi pendant la période.