L’Assemblée nationale vote la généralisation du tiers payant malgré la contestation des médecins
L’Assemblée nationale a voté en nouvelle lecture du projet de loi sur la Santé, la généralisation progressive du tiers payant d’ici fin 2017. En le mettant en place, la France rejoindra les 25 autres pays européens qui l’appliquent déjà. Seuls la Belgique et le Luxembourg font encore exception.
La mesure était combattue par la droite et les médecins libéraux. La généralisation par étapes de ce système permettant de ne plus avancer les frais d’une consultation en médecine de ville, inscrite à l’article 18 du projet de loi défendu par la ministre Marisol Touraine, a été adoptée à main levée après 1 h 15 de débats.
L’Assemblée nationale a voté de nouveau la généralisation du tiers payant d’ici fin 2017
Le vote sur l’ensemble du texte de la ministre de la Santé Marisol Touraine est programmé mardi après-midi. Il doit être adopté définitivement par le Parlement avant la trêve de fin d’année.
Après un peu plus d’une heure de débats seulement, les députés ont approuvé vendredi à main levée la généralisation progressive de la dispense d’avance de frais pour les patients en ville, présentée comme une «mesure de justice» par la majorité, mais combattue par la droite et les médecins libéraux.
Plusieurs élus Les Républicains, souvent eux-mêmes médecins, ainsi que l’UDI, sont montés au créneau pour dénoncer à l’instar de Laurence Arribagé une «mesure dirigiste» qui conduit à «la déresponsabilisation du patient» et à un «tiers perdant généralisé». A défaut de supprimer la mesure, ils ont réclamé son report ou son caractère facultatif, en vain.
«Le tiers payant, c’est au service des patients et je ne veux pas le faire contre les médecins» qui ont manifesté et fait grève à plusieurs reprises, a rétorqué inlassablement Mme Touraine, promettant «simplicité» et «rapidité de paiement» pour eux.
La députée Front de gauche Jacqueline Fraysse, tout en se prononçant pour, a aussi espéré que «le gouvernement réponde aux préoccupations légitimes» des médecins sur ses aspects pratiques. Traduction d’une promesse de campagne du candidat François Hollande, le tiers payant doit devenir «un droit» pour tous les assurés fin novembre 2017.
Avant ce chapitre, les députés avaient voté l’expérimentation de salles de consommation de drogue à moindre risque, appelées «salles de shoot» par Les Républicains, qui ont dénoncé une nouvelle fois comme Philippe Goujon un «désastre sanitaire». La ministre a pour sa part dit refuser de «fermer les yeux» sur les «situations dramatiques» de certains toxicomanes.
Tous les amendements n’étaient pas défendus dans l’hémicycle, de nombreux députés ayant regagné en cette fin de semaine leur circonscription.
De la messe à James Bond
L’examen «saucissonné» du projet de loi, mardi, mercredi soir puis vendredi après-midi, n’a pas non plus aidé à la mobilisation, déplorait dans les couloirs un membre de l’opposition, affirmant que «cela arrange bien le gouvernement».
Les attentats du 13 novembre avaient conduit à repousser trois fois le début des débats, à la demande de la plupart des groupes politiques, mais aussi des médecins qui avaient cessé une grève contre l’extension du tiers payant. Il n’empêche, les discussions ont été épiques sur plusieurs volets, et la pression de certaines corporations concernées s’est largement fait sentir, à l’approche des régionales.
Ainsi mardi soir, une large majorité de députés, souvent de régions viticoles, ont persisté et signé pour maintenir l’assouplissement de la loi Evin dans le texte Santé, contre l’avis de Mme Touraine elle-même. Il s’agit de distinguer la publicité sur les boissons alcooliques, strictement encadrée, et l’information œnologique. La loi Evin s’en trouve «défaite», selon la ministre, qui n’a toutefois pas le soutien de l’exécutif sur ce point.
De l’oenotourisme aux mérites du vin, en passant par la messe et James Bond, les parlementaires présents en masse pour défendre cet assouplissement ont invoqué toutes sortes d’arguments.
Mercredi soir, c’est à deux voix près que l’Assemblée a donné son feu vert à l’instauration du paquet de cigarettes neutre. Des députés de droite, tout comme certains socialistes, ont abondamment fait état des doléances des buralistes, et derrière eux de l’industrie du tabac.
«Oui, je suis du lobby des buralistes», s’est même exclamé Thierry Lazaro (Les Républicains), face à une ministre qui entend dissuader les jeunes de commencer à fumer. Vendredi, sur ce même chapitre du tabagisme, les députés ont supprimé l’obligation d’emplacements réservés au vapotage dans les entreprises, à la grande satisfaction de la droite.
Le tiers payant généralisé
Le dispositif du tiers payant permet — dans le cadre d’une convention préalable et valide, éventuellement assortie de conditions — à l’acheteur d’un bien et/ou au bénéficiaire d’une prestation d’en voir le règlement acquitté par une tierce personne ou un organisme tiers.
Cela revient en pratique à organiser, pour des motifs relevant de l’assistance sociale ou de la solidarité, la distribution totalement ou partiellement gratuite de biens ou services désignés.
L’exemple classique est celui des dépenses médicales en France pour lesquelles l’usager ne paie qu’une partie du coût réel des prestations dont il bénéficie, la partie non acquittée par lui étant prise en charge selon sa situation personnelle :
- soit en totalité au titre de la couverture maladie universelle (CMU) ;
- soit en partie par l’organisme public d’assurance maladie ;
- soit en quasi-totalité — s’il dispose d’une couverture volontaire dite « complémentaire » — par intervention combinée de l’assurance maladie et de l’organisme d’assurance complémentaire auquel il a préalablement cotisé (à titre individuel, ou dans le cadre d’une couverture collective obtenue par exemple dans le cadre de son entreprise).
Afin de renflouer ses caisses, l’assurance maladie a mis en place en 2010 un dispositif intitulé « Tiers payant contre génériques », dont le principe est de ne pas appliquer le tiers payant aux patients qui refusent les médicaments génériques, moins chers.
Le 9 mars 2015, la ministre de la Santé Marisol Touraine a confirmé que son projet de loi Santé serait généralisé d’ici 2017. Mesure phare de ce projet, le tiers payant sera généralisé à tous les Français d’ici la fin 2017 et dès juillet 2016 pour les Français bénéficiants d’une prise en charge à 100 % par l’Assurance-maladie. (source Wikipedia)